Quand ce lundi 2 avril Grégory entre à l'étage C de l'hôpital Foch de Suresne, au service pneumologie, Laurence Lemarchal, sa maman, est perssuadée qu'il s'en sortira au bout de quelques semaines : « Depuis quelque temps,
il ne se sentait pas bien mais on avait pris l'habitude de ce genre de rechute. » Juste avant le weekend, Grégory avait appelé sa pneumologue, Dominique Grenet : « Je veux te voir dès Lundi. »
Il sortait d'une cure de quinze jours qui n'avait rien donné. Les antibiotiques et les massages respiratoires, trois séances par jour dont deux d'une heure et demie le matin et le soir ne lui avaient été d'aucun secours.
Alors il fallait intervenir. Quand ce lundi matin, le Dr Grenet reçoit Greg, arrivé quasiment les mains
dans les poches. Karine, sa copine, a dû insister pour lui « faire son sac » au cas où,
la décision fuse : « Je te garde » lui dit-elle.
Depuis l'automne dernier, la pneumologue insiste au près de son patient pour qu'il se fasse greffer
des poumons tout neufs. L'opération est lourde et très risquée. Greg est d'accord pour y penser, mais en tout dernier recours. En janvier, il accepte néanmoins de passer un premier entretien de pré greffe qui ne l'engage à rien.
Sa rechute achève de le convaincre : le 10 avril, il est O.K. pour l'opération. Et lâche, devant ses parents, Pierre
et Laurence, et sa s½ur, Leslie : « je signe le plus beau contrat de ma vie.» Le compte à rebours est lancé. Selon les procédures de l'hôpital Foch, une fois qu'on a dit oui, impossible de revenir en arrière. Dès qu'un greffon
se présente il faut passer à l'acte tout de suite. Mais encore faut-il le trouver. Or, le groupe sanguin de Greg
est plutôt rare (B+).
« Quand il a signé, nous pensions tous avoir encore du temps devant nous, dit Pierre son père. Greg était heureux. » Quelques semaines avant son entrée à l'hôpital, il avait annoncé son intention de quitter la scène en 2007. Décision prise en décembre 2006, QUI N'A RIEN A VOIR AVEC SA MALADIE : « il voulait se concentrer pour son deuxième album et il le voyait dans les bacs à la fin de l'année », témoigne Olivier Ottin, son ami et manager. Le 26 mars
il avait eu le temps d'enregistrer une première version de son futur single « De temps en temps »,
en une seule prise, depuis la chambre d'amis de sa maison de Rheuil-Malmaison.
Il est comme ça Grégory, sa thérapie c'est le chant « ce n'était pas sa vocation première,
poursuit son père. Il disait souvent que s'il n'avait pas été malade, il aurait été sportif. C'était
un passionné, fan de l'O.M., capable de reconnaître les coureurs du Tour de France en échappée lors
des prises de vues aériennes, ou de mettre un nom sur n'importe quelle basketteuse. »
Mais la maladie ne lui a pas laissé le choix. Quand, vers l'âge de 15 ans il se découvre une voix d'or à l'occasion
d'un karaoké impromptu, va pour la musique. « Il n' était pas très bon à l'école, mais nous savions que ce n'était pas par mauvaise volonté. Il était souvent absent à cause des cures à répétition, à l'écart des autres près
de la fenêtre dans les salles de classes. Les professeurs l'aimaient bien, mais il souffrait car ses camarades de classe le traitaient de rachitique. Il n'avait que des copines qui le protégeaient. A l'âge de 16 ans, il était évident qu'il fallait qu'il quitte les cours pour se consacrer au chant, sa passion », poursuit Pierre, ancien chasseur alpin reconvertit dans le coaching de basketteurs de haut niveau, et qui s'occupait de Greg à plein-temps depuis deux ans.
Au début, Grégory galère. Mais il a un atout pour lui, sa maturité. « La maladie, c'est une force avec laquelle
on avance plus vite que les autres, inconsciemment », analyse son père, qui n'en revient toujours pas de ce dîner
à Matignon avec Dominique de Villepin, un soir de fin 2005.
« le Premier Ministre nous avait invité en petit comité avec sa femme, Marie-Laure. Inutile de vous dire
qu'avec mon épouse nous étions dans nos petits souliers. Pas Grégory. On a parlé de tout sauf de politique. Greg répondait, très à l'aise, aux nombreuses questions des Villepin, comme si ils étaient des amis de la famille. Personne ne l'a jamais impressionné. » Car à aucun moment il n'a baissé les bras. Ses parents en sont persuadés, les quatre mois passés au château de la « Star Academy » au cours desquels il a grossi de 4 kg, ce qui est exceptionnel
chez un malade de la mucoviscidose, lui ont fait gagner plusieurs années. « Quand il est né,
son espérance de vie, à l'époque, était de 17 ans. Mais nous n'avions jamais évoqué ce sujet entre nous : Grégory savait qu'il ne vivrait pas vieux, mais il comptait repousser la limite grâce à la volonté
et aux progrès de la médecine. Il a ainsi réussi à grappiller presque 7 ans, puisqu'il aurait eu 24 ans le 13 mai."
Jusqu'au bout, Grégory à lutté. « Je t'aurais putain de maladie», lâche t'il encore samedi 28 avril, 24 heures avant qu'on ne le plonge dans le coma. Ce jour là, il a « le deuxième souffle du sportif », comme dit son père.
Il va envoyer un s.m.s à Hélène Ségara qu'il adore. « Cela faisait longtemps que je n'avais pas passé une aussi bonne après-midi », articule t'il sous son masque à oxygène, en début de soirée. Depuis plusieurs jours, ses parents et sa s½ur Leslie son « carré d'as », sa « tribu d'amour », comme il les appelle, campent dans sa chambre
de l'hôpital Foch. « Ceux qui n'ont pas tout cet amour, comment font-ils ? » sourit-il alors qu'il vit un calvaire.
Le personnel de l'hôpital est formidable mais, sans climatisation, la chambre est trop chaude, il faut ouvrir
les fenêtres sur une rue bruyantes et polluée. La nuit, sa famille l'emmène dehors dans son fauteuil roulant
pour lui permettre de voir les étoiles. « Cela lui faisait du bien », dit Laurence. Mais en cette dernière nuit de samedi
à dimanche, la promenade ne durera pas plus d'un quart d'heure. Grégory ne parvient pas à trouver le sommeil.
Le dimanche au petit matin, les médecins sont de plus en plus réservés. Fabien, son copain d'enfance, arrive
pour le soutenir : Greg a encore la force de soulever son index et de lui dessiner un c½ur. Compte tenu du peu d'oxygène qu'il a dans les poumons, il aurait du être inconscient depuis longtemps. La famille s'accroche a un dernier espoir la greffe. « Greg me disait : Maman, si cette nuit le greffon arrive, j'y vais en courant » raconte Laurence. Mais il n'est jamais arrivé.
En début d'après midi après avoir parlé à sa mère, Greg dit oui de la tête pour être plongé dans un coma censé soulager son corps et ses bronches. On l'a assis sur son lit. Il ne pouvait plus parler ni bouger. « Il était là
avec son regard droit et volontaire qui voulait dire : Endormez moi, je n'en peux plus, mais réveillez moi très vite avec deux poumons tout neufs car on m'attends pour mon deuxième album. »
Il s'est éteint le lendemain à 13 heures.
archange24, Posté le vendredi 20 février 2009 05:50
un témoignage très poignant